mercredi 8 décembre 2010

Taxi-jasette - Le malheur des uns, le bonheur des autres

Jasette en taxi. Montréal, centre-ville. « Comment vont les affaires? »
- Pas fort!, dit le chauffeur. Avec l'autobus 747 qui amène le monde à l'aéroport pour 7 $ et avec les Bixis, c'est 30 % de chiffre d'affaires au moins qu'on a perdu.
- Les Bixis? Les gens qui pédalent prenaient-ils le taxi?
- C'était des petites courses, des étudiants en retard, mais il y en avait. Les touristes aussi essaient le Bixi. Et là, on va payer 45 $ en plus pour l'immatriculation de l'auto! 45 $! Mais nos permis, eux, ne baissent pas.
- Allez-vous demander que le coût du permis diminue?
- On devrait...
- Vous devez être content de l'hiver. Ça enlève des Bixis.
- Tout ça, c'est la faute du maire Tremblay. Il ne s'occupe pas du monde ordinaire!

Y avoir pensé, la cliente lui aurait parlé de la hausse des tarifs de métro et d'autobus. Pour l'encourager.

dimanche 5 décembre 2010

11 - Faire peur au monde

Faire peur au monde représente une stratégie efficace pour brouiller la réflexion. Si l'on précise, en plus, qu'on ne veut surtout pas faire peur au monde, mais qu'il s'agit d'une réalité incontournable, vous sentez-vous rassuré?

Ou doublement piégé?

Admirons donc le Conference Board qui, à la mi-novembre, a lancé avec force mots-chocs le rapport Les finances publiques du Québec : l'heure des choix a sonné, de Mario Lefebvre (*1).

Les 36 pages débordent de chiffres et calculs : de toute beauté.

Il n'est pas dans notre intention de les décortiquer.
Les perspectives qui ressortent à la lecture de ce rapport ne se trouvent pas dans l'arithmétique.

C'est l'intention qui compte, dit-on. Allons-y voir.

LE CHOIX DES DONNÉES

L'intention réside d'abord dans le choix des éléments mis en évidence par l'analyse. Nous résumons.

On a élaboré des prévisions de dépenses échelonnées sur vingt ans.
On extrapole des données de 2010 jusqu'à 2030 pour 1) le déficit du Québec, 2) les services publics en santé et 3) en éducation en lien avec 4) le vieillissement de notre société.

Pour les revenus, le Conference Board explique qu'il croit que ce sera limité par une croissance économique modeste. Rien d'autre.

Le résultat? Plus de 45 milliards $ de déficit québécois en 2031.

Le clou est enfoncé par l'unique exemple d'une unique solution que choisit l'organisme : augmenter la taxe de vente. Ça atteindrait 19,5 % en 2031 pour le Québec, selon son scénario.

Ayoye! Tsss :  l'auteur du rapport, M. Lefebvre, précise qu'il ne veut pas être « apocalyptique ». 

QU'EST-CE QUI CLOCHE DANS CETTE ANALYSE?

Il s'agit d'extrapolations et d'hypothèses, mais au final, c'est devenu ce qui surviendra. On est passé de ce qui pourrait peut-être arriver à la position de l'oracle nimbé de certitudes.

Il y a aussi tout ce qui manque, tout ce qu'on n'a pas intégré, tout ce dont on ne tient pas compte.

Par exemple, l'étude précise que le déficit actuel, établi à 4,5 milliards $, est essentiellement dû à l'argent dégagé par le gouvernement pour soutenir l'économie depuis la dernière Crise financière mondiale.

Le Conference Board n'évoque pas de mesures pour diminuer le déficit actuel, par exemple en mettant à contribution les entreprises. Elles en profitent pourtant au premier chef.

Autre lacune : le rapport se limite à une extrapolation de certaines dépenses et revenus, alors qu'un gouvernement, dirigeant toute une société, doit intégrer des critères autrement plus complexes. 

Ce qui ressort, c'est que le Conference Board a élégamment tourné les coins carrés.
Le nuage noir des hypothèses justifie le prétexte: frapper les esprits pour faire peur au monde.

Image dramatique pour image dramatique, son ultimatum est aussi impitoyable que de jeter la p'tite vieille, le p'ti vieux et la baignoire avec l'eau du bain parce qu'on veut limiter les dépenses de savon.

POURQUOI?

La réponse provient des questions posées en conclusion.

Le Conference Board agite le tocsin : si la population veut garder l'universalité des soins de santé, et conserver de bas frais pour que les jeunes s'instruisent davantage, la population doit comprendre que cela a un coût.

«C'est aux citoyennes et citoyens de dire à leur gouvernement des années à venir le type de société qu'ils désirent.»

Le Conference Board fait planer que la situation idéale pour le Québec serait un déficit éliminé avec les systèmes de santé et d'instruction publics éliminés.

Cette vision ne tient pas compte d'impacts humains, sociaux, voire économiques si elle était réalisée.

Car les dépenses en ne disparaîtront pas même si les perspectives de vivre vieille et vieux en forme s'améliorent constamment. S'instruire reste vital, d'autant que plus une personne est instruite, plus elle peut garder un bon niveau de vie et de santé.

Cela a, encore une fois, été confirmé le 29 novembre par les Résultats d'enquêtes sur la santé et les habitudes de vie des personnes aînées (*2), et c'est qui se dégage des multiples études de l'Institut de la statistique du Québec.

Le vieillissement de la population pose de vastes défis.
Or, ce rapport du Conference Board limite les champs d'action potentiels par son approche étriquée et son recours au catastrophisme émotif. Il n'ouvre pas de perspectives.

On comprend que l'objectif est d'orienter les politiciens et les dirigeants d'entreprises. Mais par rapport à tous les enjeux, et surtout à toutes les personnes en cause, les sentiers privilégiés se révèlent trop étroitement bornés.

C'est cette intention-là qui fait peur.
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*1- http://www.conferenceboard.ca/e-library/abstract.aspx?did=3902

*2- http://areq.qc.net/no_cache/publications/communiques/communique/article/347/2/

Qu'est le Conference Board? 
Il se décrit comme un organisme de recherche appliquée, le plus en vue au Canada, indépendant et sans but lucratif.
Il ajoute qu'il est objectif, non partisan, qui ne défend pas d'intérêts particuliers.
Il se finance en vendant ses services aux secteurs privé et public.
Les services : formation et  perfectionnement en direction et capacités organisationnelles, réseautage parmi les gens d'affaires et autres clients du service public, analyses et prévisions économiques, en rendement des organisations et en politiques gouvernementales.
Enfin, il est affilié au Conference Board Inc. à New York qui dessert près de 2000 entreprises de 60 pays.

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mercredi 10 novembre 2010

10 - Boumeuses, boumeurs, boomers : ambigus

Faire partie des boumeuses et des boumeurs, c'est, disons-le carrément, déplaisant. C'est comme si, à ce stade, il faut tendre vers un seul but: mettre les freins. Au dérangeant cumul d'années de vie finie, ajoutons le poids des lieux communs qui se révèlent plus négatifs que positifs. Le tableau est ambigu.

Le nouveau grand principe sous-jacent : se conditionner à se mettre au neutre, à se rapetisser, à s'amenuiser.

C'est que les boumeuses et boumeurs doivent se défendre d'exister en si grand nombre.

Ils doivent se justifier de prendre tant de place.

Ils portent les cornes de boucs émissaires pour tout ce qui a cloche chez les autres générations.

Il est également bien vu de les culpabiliser parce qu'ils ont bifurqué de leurs idéaux de jeunesse.

En plus, ce serait normal!

Les images communes: consommer, habiter en plus petit ou plus luxueux, rénover, jardiner, voyager. Profiter des enfants, collés mais pas trop. Préparer sa retraite, ça commence à presser. Se soucier de la santé, faire du sport pour le maintien des chairs. Cheminer pour accepter la déchéance liée au vieillissement.

Les boumeuses et boumeurs expérimenteraient dans le loisir et le passe-temps en se préparant à oublier les vrais emplois. Cela en carburant à la musique de leurs quinze-trente ans acharnés à rester présents.

Bien sûr, quelques personnes déprimeraient par-ci par là. Des frustrations, ils en auraient gardé au passage du temps. Mais rien de majeur; seulement un peu de poussière d'années mal nettoyées.

Ça fait beaucoup de monde qui ne ferait que transiter vers des cocons. Ça fait beaucoup de monde qui ne penserait qu'aux mille et une manières de laisser-aller...

Est-ce tout?

lundi 25 octobre 2010

Agace-méninges no 2 - La cuisine à la TV : ce qui manque

Pourquoi n'existe-t-il pas de série de télévision sur la cuisine au four micro-ondes? Malgré la myriade d'émissions de cuisine, c'est à croire que la cuisson aux micro-ondes est incompatible avec les ondes télé!

Pourtant, l'appareil est en vente depuis les années 1970. À mon premier (et toujours actif) four micro-ondes, il y  a plus de 30 ans, j'avais acheté la bible de ce nouveau mode de cuisson  La cuisine micro-ondes de Jehane Benoît (*1). Elle avait aussi été embauchée par le fabricant de fours micro-ondes Panasonic pour développer des recettes, offertes avec l'achat du four (*2).

En 2010, l'absence quasi totale d'utilisation du four micro-ondes par nos chefs à la télé reste mystérieuse. Avec la population vieillissante, où se retrouvent surtout des personnes seules et des couples, cet appareil plus petit et sécuritaire représente un atout. À hauteur de comptoir, pas besoin de se pencher: il se révèle plus simple à utiliser, même avec un handicap comme l'arthrose, par exemple.

Il n'y a pas que les grands-parents qui peuvent plus facilement enseigner ou se faire aider par leurs jeunes petits-enfants. Avec tant d'adultes au travail, cela procure des économies de temps. À moins que de réduire le temps de préparation de la bouffe avec le four micro-ondes ne paraisse pas assez poétique pour les chefs cuisiniers de la télé!
 
PLUS QUE DU RÉCHAUFFÉ

Le four micro-ondes ne sert pas qu'à réchauffer. À partir d'une recette, voici cinq versions au micro-ondes. Cette sauce est considérée comme délicate à réussir en mode conventionnel. Notre recette est adaptée de Jehane Benoît dont les derniers livres publiés ont formé l'Encyclopédie de la cuisine au four à micro-ondes (*3).

SAUCE HOLLANDAISE, BÉARNAISE OU HOLLANDAISE DE DIJON 
CLASSIQUE, MOUSSELINE OU CHANTILLY

Ingrédients de base (Vous pouvez doubler les quantités.)
1/4 tasse de beurre doux non salé (75 g), ou même margarine.
2 jaunes d'oeuf, gros de préférence.
Sel, poivre.

Hollandaise- Jus d'un quart ou un demi-citron, au goût (1 à 3 cuil. à table, au goût)

Béarnaise-  Remplacer le jus de citron par 1 c. à table (ou jusqu'3, au goût) de vinaigre de vin blanc, de cidre ou de champagne plus 1 c. à table (ou plus, au goût) d'estragon frais ou séché, et 2 c. à table d'oignon vert haché fin.

Hollandaise de Dijon- Remplacer le jus de citron par 1 c. à table de moutarde de Dijon mélangée à 2 c. à table d'eau.

Préparation
Mettre le beurre dans un bol et chauffer au micro-ondes durant 10 secondes à faible intensité. Recommencez si le beurre n'est pas tout fondu.
Ajoutez au beurre le jus de citron et les jaunes d'oeufs.
Fouettez 15 secondes.
Chauffer 30 secondes à intensité maximale. Fouetter 10 secondes.

Si la texture vous paraît trop liquide, fouettez 10 secondes puis chauffez à intensité maximale 20 secondes. Vous pouvez refaire l'opération  plus d'une fois.

À savoir: si les ingrédients se divisent, ajouter 1 c. à café d'eau et fouettez 10 secondes. Vous pouvez refaire cette opération au besoin.

Truc pour la béarnaise: pour une sauce sans parcelles feuillues, mettre le vinaigre, l'estragon et l'oignon dans une tasse et chauffer 3 minutes à intensité maximale. Passer au tamis avant d'incorporer le vinaigre au mélange beurre et oeufs.

Version mousseline
Fouetter les blancs d'oeufs mis de côté dans la recette de base jusqu'à consistance assez ferme. Avec une spatule, incorporez délicatement, en trois fois, à la sauce hollandaise, béarnaise ou hollandaise de Dijon.
Chauffer 20 secondes à intensité maximale, fouettez puis chauffer encore 20 secondes et fouetter.

Version Chantilly
À l'une des trois sauces de base, mélangez 115 ml (1/2 tasse) de crème fouettée.

Servir.

*1- Jehanne Benoit. La cuisine micro-ondes. Les Éditions de l'homme, 1975

*2- Jehanne Benoit, Encyclopédie de la cuisine au four à micro-ondes, 7 volumes, Éditions Messageries du Saint-Laurent, 1985 et suivants.

Publicité de Jehanne Benoit pour Panasonic

mercredi 20 octobre 2010

Agace-méninges no 1- Les docteurs à Radio-Canada.

Première réflexion quand l'émission Les docteurs est arrivée à la télévision :  pourquoi quatre docteurs? Pourquoi personne d'autre? Il aurait été réaliste (et innovateur) de présenter Des docteurs, des infirmières et des autres soignants.

On sait maintenant qu'il s'agit d'une adaptation de la série américaine The doctors. Acheter le concept permet de piger dans du contenu déjà éprouvé. À l'écoute, l'omnipraticienne Chantal Guimont et les trois spécialistes soit la pédiatre Gaelle Vekemans, le chirurgien orthopédique Jacques Toueg et l'urgentologue Alain Vadeboncoeur se révèlent sympathiques comme tout.

Ils remplissent leur mandat que le docteur Vadeboncoeur a ainsi décrit : « Rassurer certains patients, renseigner pour éviter d'aller à l'urgence, répondre à des questions que les gens n'ont pas le temps de poser quand ils visitent le médecin (sic). ».

Ils n'en reste pas moins que si les docteurs restent les héros du système de santé, la grande majorité de celles et ceux qui nous soignent quand survient un problème, ce sont des infirmières (trois quarts du personnel), des ambulanciers, des psychologues, des chiropraticiens, notamment... Leur faire une place régulière dans l'émission aurait été plus représentatif, sans compter le dynamisme potentiel des échanges entre des perceptions complémentaires.

Les docteurs, diffusé du lundi au jeudi à 16 heures à Radio-Canada, mais pas (encore?) intégré à Tou.TV sur internet.

lundi 18 octobre 2010

9 - Boumeuses, boumeurs à 50 ans: surtout pas!

Anne fête 50 ans en 2010. Elle refuse d'être une boumeuse. «Les boumeurs, je ne m'y identifie pas! Les boumeurs ont tout eu, ils n'ont rien laissé aux plus jeunes! Ils ont pris tous les emplois!»

Accuser les boumeurs d'être favorisés au détriment des autres est devenu un slogan.

Or, c'est faux.

Mais les frustrations d'Anne se dressent, si intenses, qu'elle préfère s'exclure de cette génération plutôt qu'admettre qu'elle représente elle-même une preuve que les boumeuses et boumeurs n'ont pas tout eu, ni tout pris en se foutant des autres.

Qui a décidé d'être boumeuse ou boumeur? Personne.
Veut, veut pas, Anne est une boumeuse, car l'étiquette traduit une donnée de démographie.  C'est basé sur des dates de naissance: au Québec, du 1er juillet 1946 au 30 juin 1966, un très fort taux de natalité (de 30 à 24 bébés pour 1000 personnes) s'est maintenu (*1). Pour comparer: avec une augmentation de la natalité depuis 2003, elle atteignait 11,4/1000 en 2009 (*2).

Ajoutons une importante diminution de la mortalité infantile (moins d'un an de vie), de la mortalité des femmes accoucheuses, en plus de la mortalité en général.

Mais qui reprocherait aux parents des boumeurs d'avoir fait trop d'enfants, qui ont survécu en plus grand nombre et qui ont fait aussi des enfants?

Le boum des bébés a duré vingt ans: ce n'est pas inhabituel comme durée en démographie. C'est assez long cependant pour modifier nombre d'éléments de base dans nos sociétés.


DES EMPLOIS À RABAIS

Anne donne une première piste: le manque d'emplois. Précisons: de bons emplois! Elle dit vrai. Depuis trente ans, le travail est devenu de plus en plus précaire. Cela a commencé mine de rien vers la fin des années 1970. Ça s'est étendu et ça se poursuit toujours. Cette réalité a été abordée dans deux précédentes chroniques (Voir *3 et *4).

Les premiers enfants du boum, nés en 1946, ont atteint 20 ans en 1966.  Les générations du boum étaient âgées de 10 à 30 ans en 1976. Or, la plus grande période de prospérité économique, sociale et individuelle au Québec a eu lieu de 1946 à 1976.
Les premiers bénéficiaires (et initiateurs) de ce qu'on  a surnommé «les trente glorieuses» furent les grands-parents et les parents des boumeurs. Après avoir vécu les suites du Krach boursier de 1929, connu une et parfois deux guerres mondiales et les chambardements d'une société de plus en plus industrielle, ils ont pu enfin souffler.

En 1966, quand les premiers boumeurs ont abordé le monde du travail, il existait beaucoup d'emplois réguliers à temps plein. Tant mieux. Cela a permis d'absorber une partie de ces si nombreux jeunes adultes.

En 1982, il s'est produit une crise financière mondiale, due comme toutes les autres à la spéculation à outrance. Elle a provoqué une insécurité générale. Elle a aussi servi aux employeurs - souvent comme prétexte - pour couper de tous bords tous côtés dans les conditions de travail. C'est au point que la débandade des emplois s'est poursuivie malgré d'autres périodes de prospérité économique.

C'est simplifié, mais ça explique qu'à partir de 1982, il y a eu de nombreuses pertes d'emplois, et même les bons emplois ont perdu des plumes.
Cela explique qu'une portion des boumeurs, puis des générations suivantes s'est retrouvée face à un marché du travail de plus en plus composé d'emplois précaires, avec des conditions racornies. Si une personne est née en 1960, comme Anne, elle avait 22 ans en 1982. Qu'elle ait poursuivi ses études plus longtemps ou pas, elle en a subi les effets généralisés à moyen puis long terme.

Autre conséquence : les personnes qui détenaient un bon emploi s'y sont davantage accrochées; elles sont devenues plus frileuses, voire peureuses. L'insécurité est également entrée dans leur vie pour ne plus pouvoir en sortir, quelles que soient les générations. Cela a apporté des conditions propices au « chacun pour soi ».

La précarisation des emplois est devenue un fondement majeur aux frustrations associées à l'insécurité. 

Le plus facile, quand on est inquiet et frustré, c'est de chercher un bouc émissaire. La cohorte des boumeuses et boumeurs est devenue un bouc émissaire idéal, parée de tous les acquis et avantages, en plus de l'égocentrisme. Il y a de quoi devenir anti boumeur!

Mais il n'y a pas que cet élément à considérer. Les boumeuses et les boumeurs ne sont pas coupables de tout, mais ils ne sont, non plus, exempts de lacunes.
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*1- Hervé Gauthier, Sylvie Jean, Georges Langis, Yves Nobert, Madeleine Rochon. Vie des générations et personnes âgées aujourd'hui et demain, Volume 1, Condition de vie, Institut de la statistique du Québec, 2004.

*2- Institut de la statistique du Québec.

*3- Jeunes, vieilles et vieux: le droit au travail?
*4- Jeunes, vieilles et vieux: le droit au travail? (Suite)

lundi 19 juillet 2010

8- Statistique Canada: croire au lieu de savoir

Les statistiques sont fondamentales. Les données statistiques servent même à plus d'usages qu'on l'aurait cru. Nous le réalisons parce qu'on risque de les perdre : Statistique Canada ne sera plus un outil exact.

C'est ce que le gouvernement conservateur a décidé : atténuer la véracité des statistiques en laissant plus d'espace à l'arbitraire pour le recensement de la population. Voici l'analyse qu'en fait l'Institut de la statistique Québec : Recensement 2010: impact pour le Québec *1.

Au lieu de chercher le plus de crédibilité possible, les gens qui dirigent le Canada préfèrent y substituer le caprice personnel. Ça me tente-tu de répondre? *2

Le résultat: affaiblir les informations. Pourquoi? Pour ne pas savoir, semble la seule réponse plausible. Or, quand on ne sait pas, ça laisse plus de place au flou, aux impressions, aux préjugés bref aux croyances.

Du créationnisme en statistique! 

*1- http://www.stat.gouv.qc.ca//salle-presse/communiq/2010/juillet/juillet1015.htm

*2- http://www.ledevoir.com/politique/canada/292735/huit-questions-pour-decrire-une-societe

jeudi 17 juin 2010

7 - 24 juin: Vive Marie-Mai

À la St-Jean, au spectacle principal payé par les deniers publics, il n'y aura qu'une chanteuse. Pouvons-nous être agacés que plus de présence féminine ne soit pas un critère normal à cet événement du 24 juin?

Et cela même si personne - ni aucun média - ne l'a publiquement remarqué?

Lors de l'annonce du programme au parc Maisonneuve à Montréal, l'animateur Guy A Lepage a souligné que la brochette d'artistes 2010 représente parfaitement le Québec actuel, selon le journaliste Philippe Renault de Rue Frontenac.com (*1).

Les artistes sont de calibre, effectivement: Marie-Mai, Dubmatique, Dumas, Jonas, Les trois accords, Luck Mervil, Yann Perreau, Paul Piché, les Porn flakes pour le  spectacle télévisé de 21 heures. Les Tireux'd'roches animeront la foule à 17 heures, et Dubmatique à 19 heures. Ajoutons Marie-Élaine Thibert qui ne chantera pas; elle récitera le texte patriotique de la St-Jean avec Marc Béland.

Des explications à ce manque de femmes pour chanter en vedette, il doit y en avoir des tas: une question de hasard, personne n'a fait exprès, ça adonne de même, il n'existe aucune mauvaise volonté, tous les hommes sur scène sont profemmes, voire proféministes. Ouais.

Il ne s'agit pas de s'insurger contre la liberté artistique fondamentale des concepteurs. Mais chaque projet artistique, surtout télévisé et destiné à tout le public comme celui du 24 juin, est assorti d'exigences et contraintes. Ce peuvent être le budget, la technique, l'espace scénique, la disponibilité des artistes, le thème, la cause à soutenir, voire les demandes des commanditaires. Etc.

Ces balises font partie des défis à relever pour réussir.
Pourquoi une participation équitable de femmes en avant-plan n'en fait-elle pas partie, tout naturellement?
Est-ce sexiste, une telle différence entre le nombre de femmes et d'hommes dans ce spectacle? Ça reste discutable, au minimum.

Guy A Lepage et son entourage étant connu pour des êtres socialement sensibles à l'égalité, à l'équité, cela n'excuse pas une telle indifférence.

Inversons la situation. Si le spectacle de la St-Jean présentait sept chanteuses ou groupes féminins et un chanteur, aurait-on remarqué la  différence femmes-homme?
Non?
L'aurait-on considérée comme anodine, sans signification particulière? Oui?
Aurait-on posé la question du manque de présence masculine pour cette fête de l'affirmation de notre identité nationale?
Non?
Quelle est la devise nationale nationale du Québec?

Au moins, il y a Marie-Mai. Le thème de l'année 2010, Célébrons notre créativité, est aussi conjugué au féminin.
Yé.

 *1- http://ruefrontenac.com/spectacles/musique/23238-spectacle-fete-nationale-hommages

Sujets connexes- Les boumeuses, boumeurs et boomers sont-ils des bébés?
http://danielledesbiens.blogspot.com/2010/04/3-les-boumeuses-boumeurs-ou-boomers.html

J'ai l'air de mon âge
http://danielledesbiens.blogspot.com/search/label/J%27ai%20l%27air%20de%20mon%20%C3%A2ge 
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samedi 22 mai 2010

4 - Banque: REER et Public

BMO est une compagnie de placement d'argent. Elle veut le plus d'argent à placer avec le moins de contraintes. Mais dans ses explications, BMO (ou Banque de Montréal) camoufle ses intentions quand elle prend la défense des vieilles et vieux, particulièrement des plus de 70 ans.

BMO demande de défiscaliser le plus possible les REER. Avouons que c'est alléchant.
Pourtant, accepter les propositions de BMO risque de nuire à la majorité des gens. Pourquoi?

Les coûts pour ces cadeaux fiscaux aux détenteurs de REER seraient assumés par l'État canadien (donc les contribuables). Alors que les gouvernements se gargarisent avec le manque d'argent, il est à craindre que si ce volet est privilégié, on s'en serve pour «oublier» des options plus sociales, des améliorations qui toucheraient plus de gens.

Le meilleur véhicule, car il sert tout le monde de 65 ans et plus, c'est la Pension de vieillesse, et la section Sécurité de revenu garanti pour les plus pauvres.

Le second moyen, c'est un régime de retraite lié à l'emploi comme le Régime des rentes du Québec et les régimes complémentaires d'entreprise où l'employeur et l'employé cotisent.

Les REER sont le troisième moyen de recevoir de l'argent à la retraite. Nous pouvons y investir jusqu'à 18% du revenu annuel. Il faut évidemment pouvoir exclure le montant de son budget courant. Malheureusement, ce n'est pas le cas de la majorité des gens, et encore moins pour des sommes importantes. Plus on a de revenus, plus on peut prendre de REER, mais moins on en gagne, moins c'est possible.

IMPOSABLES AUJOURD'HUI... OU PLUS TARD

Les cotisations annuelles versées à des régimes semi-publics (RRQ), d'entreprises (RCR) ou privés (REER) permettent de diminuer notre revenu imposable. En fait, il s'agit du report à plus tard d'un revenu imposable.
Quand une personne en retirera les bénéfices, elle sera imposée.

Pour les régimes d'entreprises, l'accès commence souvent à partir de 55, voire 50 ans. Pour un régime semi-public comme la RRQ, ça intervient à partir de 60 ans. La Pension de vieillesse démarre à 65 ans.

Pour les REER, qui peuvent être retirés n'importe quand, c'est à partir de 71 ans qu'il y a une obligation d'en retirer un pourcentage prédéterminé; le REER est alors transformés en FERR. Chaque année et ce, jusqu'à 94 ans, l'argent du FERR est peu à peu ajouté au revenu imposable.

Il reste un avantage fiscal. En général, une personne gagnera moins quand elle aura cessé le travail rémunéré à plein temps ce qui est le lot de la plupart des 71 ans et plus. Donc, elle sera mois imposée qu'à l'âge où elle a pris des REER.

BMO: CONFUSION ENTRE ÉPARGNE ET REER

BMO est intervenu au Comité sénatorial des banques et du commerce canadien ainsi qu'au Comité permanent des finances de la Chambre des communes (*). Toutes sortes de mesures y sont soumises.
Par exemple, certains groupes ont proposé que la Pension de vieillesse soit augmentée significativement vu qu'elle touche tout le monde. D'autres ont réclamé un système pour que tous les employés aient accès à un régime complémentaire d'entreprise.

Les propositions de BMO visent plutôt à soustraire les REER des revenus susceptibles d'être imposés. Ses arguments présentent les règles actuelles comme un dispositif qui n'est pas assez souple pour chaque individu.

Le camouflage intervient lorsque les propos de BMO donnent l'impression que les épargnes sont limitées au REER. Rien n'empêche d'épargner s'il reste de l'argent après une cotisation maximale au REER.

Même après 71 ans, une fois sorti du FERR, il n'existe aucune obligation de tout dépenser: l'argent peut être réinvesti... Il est donc faux de sous-entendre que l'individu ne dispose pas de la souplesse requise pour ses besoins.

Sortir des montants du FERR ne fait que les rendre imposables. Ce n'est qu'équitable par rapport aux autres contribuables.

Ce serait un mauvais service à rendre à tout le monde de traiter tous les gens âgés comme étant, de facto, misérables dans le système actuel. Ça ne convient certes pas aux détenteurs de REER assez aisés pour ne pas être obligés, à leur retraite, d'utiliser cet argent pour arrondir leurs fins de mois.

LES PROPOSITIONS DE BMO

1- Ne plus obliger de cesser de cotiser à 71 ans.
2- Ne plus obliger de vider les fonds FERR selon des règles prédéterminées, à partir de 71 ans.
3- Au décès, transférer les REER à la génération suivante, à l'abri de l'impôt et autres règles de succession.
4- Ne pas imposer tout l'argent des FERR comme un salaire ou des intérêts, mais imposer le rendement comme des dividendes et gains en capital qui sont moins imposés. (La situation actuelle est-elle injuste? Certains arguent que pour favoriser l'équité, il faudrait le contraire soit que les dividendes et gains en capital soient imposés autant que le salaire...)
5- Hausser le plafond des cotisations annuelles permises pour un REER ( le maximum pour 2010 est 22 000 $).

Toutes ces mesures favoriseraient davantage les détenteurs de REER par rapport aux autres régimes de retraite dont les revenus resteraient, eux, pleinement soumis à l'impôt.

On se demande donc pourquoi l'État canadien devrait subventionner encore plus fortement ce type d'épargne, par rapport aux autres. Car si quelqu'un doit payer beaucoup plus d'impôt à cause d'un retrait obligatoire du FERR, ça signifie que l'argent pour bien vivre ne manque pas.

Quel est l'intérêt de BMO avec ces propositions? Elles profiteraient largement aux compagnies de placement d'argent en gardant plus d'argent à leur disposition plus longtemps. Et cela couperait dans leurs obligations règlementaires annuelles en n'étant plus obligées de redonner aux détenteurs une partie du FERR, à partir de 71 ans.

BMO ignore combien ses propositions pourraient coûter à l'État canadien.

*- BMO Communiqué de presse, 22 avril 2010
http://www2.bmo.com/news/article/0,1083,contentCode-9799_divId-4_langId-2_navCode-112,00.htmls

jeudi 22 avril 2010

3 - Boumeuses, boumeurs, boomers : sont-ils des bébés?

Qu'est-ce qu'un bébé? Un être égocentrique, irresponsable. C'est normal. Qu'est-ce qu'une boumeuse ou un boumeur? Un bébé. Et ce n'est pas normal.
Ça reste pourtant l'étiquette courante: bébé-boumeur, ou la plupart du temps à l'anglaise: baby-boomer.

Jusqu'à quel point la persistance du bébé pour en parler influence-t-elle notre perception de cette génération?

Traiter un enfant de bébé signifie que sa conduite est par trop puérile, et pour un adulte, que la personne manque totalement de maturité *.
Si vous demandez à une personne sa définition de boumeur, serez-vous réellement surprise ou étonné qu'elle ressemble souvent à celle d'un bébé?

«Nombriliste, insouciant des conséquences, préoccupé surtout de leur confort, indifférents aux besoins des autres» et tutti quanti: ça se retrouve beaucoup trop dans les commentaires pour se révéler anodin.

Il n'existe même pas l'excuse de l'âge, n'est-ce pas?
À partir de 1946, le boum des bébés a duré jusqu'en 1960 avant de diminuer progressivement (bonjour la pilule anticonceptionnelle).
En 2009, les 2 298 443 personnes nées à cette époque représentaient 29,4% de la population du Québec **.

La réalité et notre perception de cette réalité ne concordent pas nécessairement.
C'est pourquoi le choix des mots, premiers outils de notre pensée, n'est pas insignifiant même s'il se révèle inconscient.
C'est en ce sens que le stéréotype bébé accolé à boumeur doit être questionné.

La réalité montre que les plus âgés fêteront 65 ans en 2011.
Les plus jeunes atteignent 50 ans en 2010.
Ça commence à faire bébé gâté pourri, ce que d'aucuns ne se privent pas de prétendre, d'ailleurs. Et ça traduit de la frustration, au mieux.

Ont-ils raison? Est-ce le portrait des boumeuses et des boumeurs que vous connaissez?
Il doit bien y avoir quelques vieux bébés dans le tas, mais en majorité? C'est si restrictif.

Ça vaut d'explorer comment les boumeuses et boumeurs s'inscrivent dans la société,
et surtout comment toutes les générations s'articulent entre elles.

Va pour les boumeuses et boumeurs, une préférence personnelle de l'auteure pour le français.
Va pour boomers qui est aussi accepté en français...
Mais pour identifier cette génération, dans cette chronique, nous lâcherons le bébé!
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* Dictionnaires Larousse, Antidote 2010.
** Source: Institut de la statistique Québec.